À l'occasion de la minitournée de François Hollande en Afrique mi-juillet, "Jeune Afrique" revient sur les dérapages, contrôlés ou pas, qui ont marqué les interventions africaines du président français. De Kinshasa à Bangui.
Après le Sénégal, la RDC, la Centrafrique, le Mali, l'Afrique du Sud, l'Algérie,
le Maroc, la Tunisie, François Hollande va effectuer une nouvelle tournée en
Afrique. Attendu en Côte d'Ivoire le 17 juillet pour une visite d'État reportée
à plusieurs reprises, il se rendra ensuite au Niger et au Tchad avant de se
rendre une semaine plus tard à la Réunion, aux Comores et à Mayotte.
Le dirigeant socialiste est arrivé à l'Élysée avec l'ambition affichée - comme
son prédécesseur - de tuer définitivement la "Françafrique". Sa politique
africaine a surtout été marquée par deux interventions militaires conséquentes
au Mali et en Centrafrique. Et s'il entretient de bonnes relations avec la
majorité de ses homologues africains, ses interventions sur ou au sujet du
continent n'ont pas échappé à quelques dérapages. Contrôlés ou pas.
L'offense de Kinshasa
L'image a tourné en boucle, reprise par toutes les télévisions. Le 13
octobre 2012, en ouverture du 14è sommet de la Francophonie à Kinshasa, François
Hollande rencontre son homologue congolais, Joseph Kabila. La poignée de main
est froide et furtive. Tout juste élu, le chef de l'État français est soucieux
de faire comprendre à Kabila qu'il ne passera pas outre la question des droits
de l'homme. Mais son comportement est vécu comme une véritable humiliation et
irrite les présidents africains présents à Kinshasa.
L'ambiguïté face au MNLA
La politique de la France vis-à-vis du Mouvement national de libération de
l'Azawad (MNLA) n'a eu de cesse d'irriter Bamako. Au moment de l'intervention
Serval, les forces françaises participent à la reconquête de Tombouctou et Gao,
mais s'arrêtent à Kidal (les Français prennent juste l'aéroport), bastion des
rebellions Touaregs. Un peu plus d'un an après, alors que la situation reste
toujours tendue dans le Nord-Mali, la position française a été largement
critiquée par les autorités maliennes et la population. Lors des récents combats
de Kidal, certains officiels maliens n'ont pas caché leur agacement vis-à-vis de
l'attentisme français.
La gifle de Neuilly
Entre la France et le Maroc, rien ne va plus. Tout a commencé par l'irruption,
le 20 février, d'une escouade de policiers en gilet pare-balles à la porte de la
résidence neuilléenne de l'ambassadeur du royaume en France, Chakib Benmoussa.
Il y a eu ensuite la fouille au corps de Salaheddine Mezouar, le ministre
marocain des Affaires étrangères, en transit à l'aéroport de Roissy. Et enfin,
l'irruption de Mustapha Adib, ex-capitaine des Forces armées royales (FAR) et
opposant notoire depuis son séjour en prison au début des années 2000, sur le
seuil de la chambre du général Abdelaziz Bennani en soins dans un hôpital
militaire parisien. Tout pour vexer le Maroc.
La blague de mauvais goût
La plaisanterie présidentielle aura irrité sévèrement l'Algérie pendant
plusieurs jours. Prenant la parole le 16 décembre devant le Conseil
représentatif des institutions juives de France (Crif), le chef de l'État
français avait déclaré avec ironie que Manuel Valls, ministre de l'Intérieur,
était rentré d'Algérie "sain et sauf". Avant d'ajouter : "C'est déjà beaucoup".
La saillie de François Hollande a été fort mal accueillie à Alger, où les
souvenirs douloureux de la guerre civile, dans les années 1990, restent très
vifs. Le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a estimé
qu'il s'agissait d'un "incident regrettable" et d'une "moins-value" pour les
liens entre les deux pays.
Face à ces réactions, François Hollande avait exprimé dans un communiqué "ses
sincères regrets pour l'interprétation qui a été faite de ses propos". "Chacun
connaît les sentiments d’amitié que François Hollande porte à l’Algérie et le
grand respect qu'il a pour son peuple, comme l'ont prouvé la visite d’État qu'il
a effectuée en décembre dernier et les discours qu'il a prononcés", avait ajouté
l'Élysée
L'impartialité de l'opération Sangaris
À Bangui, les soldats français sont accueillis en héros. Nous sommes en décembre
2013, la Centrafrique est en plein chaos. L'intervention française évite un
véritable bain de sang. Mais un malaise se créée dès les premières opérations de
désarmement. L'opération Sangaris cible les ex-rebelles de la Séléka sans en
anticiper les conséquences : les populations musulmanes sont immédiatement
prises pour cible par les milices anti-balaka. Jean-Yves Le Drian le reconnaîtra
plus tard : la France a sous-estimé le pouvoir de nuisance des anti-balaka et a
mal anticipé le niveau de haine qui parcourt de nombreuses franges de la
population.
Par Vincent DUHEM